Lundi 30 avril 2018

L’approche méthodologique de l’évaluation des agences d’architecture

L’évaluation d’une agence d’architecture dépend avant toute autre chose de sa forme d’exploitation.

Dans le cadre d’un exercice individuel, l’architecte quand cela est possible cèdera le droit de présentation de clientèle et le matériel lié à l’exploitation de cette dernière.

Les travaux en cours seront facturés à l’acquéreur.

Dans le cadre d’exercice sous forme de société de capitaux, les architectes associés ou actionnaires cèderont des titres mobiliers représentatifs de leur participation au capital.

Ces valeurs mobilières seront valorisées sur la base d’une situation nette réévaluée des éléments incorporels et de tous autres actifs recélant des plus-values latentes et de tous passifs latents connus au jour de la cession ou indiqués dans l’annexe des comptes.

LES VALEURS INCORPORELLES : LE DROIT DE PRESENTATION DE CLIENTELE

Les valeurs incorporelles sont essentiellement constituées du droit de présentation de clientèle.

C'est sans aucun doute la valeur la plus difficile à déterminer car elle fait appel à de nombreux critères subjectifs dont la « valeur » attribuée à chacun d'eux est fonction des objectifs et de la personnalité de chacun.

Quel que soit le mode d'exercice, il convient de rechercher et de définir la typologie de la clientèle, quantifiée en termes de contrats terminés, de contrats en cours et d'affaires potentielles signées ou ayant de fortes chances de réussite.

L'analyse du passé apporte des renseignements sur la notoriété du cabinet, la qualité de la clientèle traditionnelle, la qualité des prestations fournies, quantifiée en terme d'importance et du nombre des sinistres déclarés.

Mais cette analyse n'apporte aucune garantie pour l'avenir.

En effet, les clients anciens n'entendent peut-être pas renouveler leur investissement et, de même, les relations entretenues entre l'architecte et ses clients, en raison de certaines affinités, sont parfois difficilement transmissibles.

Enfin, la procédure de recours aux concours, est un frein évident à la fidélisation de la clientèle et, a fortiori, à sa transmission.

Ce n'est que sur les contrats en cours et potentiels que l'architecte cessionnaire pourra le mieux appréhender la qualité de la clientèle et véritablement bénéficier du droit de présentation.

Le cédant doit s'engager à assurer effectivement la « présentation de la clientèle » à son successeur.

Une période (dont il faut déterminer la durée) de travail commun entre le cédant et le cessionnaire doit permettre d'assurer cette présentation.

Cette obligation justifie la forte « moins-value » observée en cas de reprise d'une agence dont l'exploitant est décédé ou ne pouvant plus exercer ses activités.

L'étude du fonctionnement de l'agence, tant au plan de son organisation technique que de son organisation humaine, constitue également un élément de pondération.

L'autonomie dans son travail et la capacité du personnel à fidéliser la clientèle par un contact direct, quel que soit le détenteur du capital, représente un point très positif pour la « bonne » transmission de l'agence. L'ensemble des critères évoqués ci-dessus permettent de pondérer à la hausse, comme à la baisse, l'évaluation mathématique de la présentation de la clientèle.

La valeur du droit de présentation de clientèle se calcule toujours sur un résultat retraité espéré, rentabilisant à plus ou moins brève échéance l'investissement que l'on s'apprête à effectuer.

Cette approche mathématique peut reposer sur une moyenne de résultat annuel retraité calculée sur les deux à cinq années antérieures.

Dans un premier temps le résultat moyen normalisé ainsi obtenu, et après retraitement de l’impôt théorique correspondant, est multiplié par le coefficient représentatif de la qualité de la clientèle pour obtenir la « valeur de la clientèle ».

Les résultats antérieurs servant de base à ces calculs doivent subir quelques retraitements.

Dans le cadre d'une exploitation individuelle ou en société civile professionnelle d'architecte, le résultat est constitué par la différence entre les recettes et les dépenses de l'année qui, en raison du décalage entre la réalisation des travaux et l'encaissement des honoraires, n'ont pas forcément un lien direct avec l'activité de l'agence sur la même période.

Il est nécessaire de s'assurer de la fonction linéaire de celle-ci car certaines ventilations importantes peuvent avoir des conséquences significatives sur le résultat.

Si un système de gestion, intégrant la notion de créances et dettes, est mis en place dans l'agence, celui-ci peut servir de base de calcul et nous replacer dans le même contexte qu'une société commerciale.

Le résultat déclaré dans les entreprises individuelles inclut la rémunération des capitaux et du travail de l'exploitant. Dans les structures commerciales, la rémunération allouée au dirigeant est déduite du résultat, mais il convient de s'assurer de sa « normalité » par rapport au travail fourni.

Il faut également se méfier des « apparences ».

Un fort résultat constitue une valeur de rendement intéressante, mais bien souvent celui-ci est obtenu par une implication importante de l'architecte entretenant un « intuitu personae » fort avec sa clientèle, d'où une difficulté à la transmission contrariant l'aspect positif du résultat.

Dans un deuxième temps, la rentabilité de l’agence exprimée sous la forme d’un pourcentage est déterminée à partir du résultat moyen normalisé.

Ce pourcentage est alors appliqué aux recettes attendues pour chacune des années sur la durée des contrats signés, ou ayant de fortes chances de réussite.

La marge cumulée ainsi obtenue pour chaque année est actualisée, après prise en compte de l’impôt théorique, à un taux sans risque éventuellement corrigé d’aléas conjoncturels.

La somme des marges annuelles actualisées représente alors la « valeur des contrats ».

Les recettes à considérer sur ces contrats doivent être corrigées d’un niveau de risque dit opérationnel.

Il est en effet évident que les chances de réussites et d’aboutissement d’un contrat dépendent de la phase opérationnelle dans laquelle il se trouve, au jour de l’évaluation.

Un retraitement des recettes estimées sur les contrats signés et non terminés ou non commencés devra être effectué en fonction de son avancement en terme de phase opérationnelle.

L’addition de la « valeur de clientèle » et de la « valeur des contrats détenus » représente alors, la valeur du droit de présentation de clientèle.

LES VALEURS CORPORELLES : LE MATERIEL ET AUTRES BIENS

Dans le cadre d’un exercice individuel, et comme nous l’avons précisé précédemment, l’architecte cèdera au-delà du droit de présentation de clientèle son matériel et ses encours.

Le matériel pourra être évalué à partir d’une valeur déterminée à partir du cours du marché de l’occasion quand il en existe un.

Dans le cas contraire, la valeur pourra être estimée à partir de la valeur à neuf diminuée d’un coefficient de vétusté.

Ce coefficient sera calculé de telle façon à prendre en compte un amortissement normal du matériel et son état d’usure ou d’obsolescence.

Les en-cours seront facturés à l’acquéreur pour le montant des dépenses engagées pour les réaliser.

Dans le cadre d’un exercice sous forme de société de capitaux, l’architecte cèdera des valeurs mobilières représentatives d’une part du capital social.

Dans ces conditions il sera déterminé une valeur de l’action ou de la part sur la base d’une situation nette réévaluée de la valeur réelle des éléments incorporels et corporels.

Dans les sociétés commerciales, la valeur généralement retenue pour les matériels et autres installations correspond à la valeur nette comptable figurant dans les états financiers.

Seuls sont à retraiter les matériels pour lesquels il existe un marché de l’occasion qui permet de justifier d’une valeur supérieure à la valeur comptable et fiscale.

Pour le cas des matériels et biens acquis en crédit-bail, il sera nécessaire de considérer l’actif comme s’il avait toujours été inscrit au bilan et amorti en conséquence tout en considérant en contrepartie une dette financière et la charge de l’intérêt.

Les autres actifs cessibles seront estimés à leur valeur de marché à dires d’expert, comme par exemple les terrains, constructions ou encore les titres de participation.